AFFAIRE PELTEREAU-VILLENEUVE c. SUISSE

28. Oktober 2014

DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE PELTEREAU-VILLENEUVE c. SUISSE

(Requête no 60101/09)

ARRÊT

STRASBOURG

28 octobre 2014

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Peltereau-Villeneuve c. Suisse,

La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de:

Guido Raimondi, président,

Işıl Karakaş,

Nebojša Vučinić,

Helen Keller,

Paul Lemmens,

Egidijus Kūris,

Robert Spano, juges,

et de Stanley Naismith, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 7 octobre 2014,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 60101/09) dirigée contre la Confédération suisse et dont un ressortissant de cet État, M. Benoit Peltereau-Villeneuve (« le requérant »), a saisi la Cour le 22 octobre 2009 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le requérant a été représenté par Me Barth, avocat à Genève. Le gouvernement suisse (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, M. F. Schürmann, de l’Office fédéral de justice.

3. Invoquant l’article 6 § 2 de la Convention, le requérant allègue que les termes employés par le procureur général dans son ordonnance de classement des poursuites pour prescription de l’action pénale ont méconnu son droit au respect de la présomption d’innocence.

4. Le 1er octobre 2013, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. Le requérant est né en 1958 et réside à Juvigny-En-Perthois.

6. Le 21 janvier 2008, l’Official du Diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg informa le procureur général qu’une enquête canonique avait été ouverte contre le requérant, curé archiprêtre, pour soupçons d’abus sexuels. Il suspendit également le requérant de ses fonctions.

7. Une procédure fut ouverte contre le requérant par le procureur général, notamment pour contrainte sexuelle, viol et actes d’ordre sexuel commis sur des personnes incapables de discernement et de résistance. La police judiciaire reçut les témoignages des deux prétendues victimes. Elle procéda également à l’audition du requérant au cours de laquelle, en l’absence d’un avocat, il reconnut les faits avant de se rétracter deux jours plus tard.

8. Par ordonnance du 25 septembre 2008, le procureur général du canton de Genève classa la procédure. Il considéra que le requérant avait à tout le moins commis, sur deux personnes, des actes d’abus de détresse, mais que, les faits remontant à 1991 et 1992, l’action pénale était prescrite. Dans la motivation de l’ordonnance de classement, le procureur général indiqua que :

« Au vu de ce qui précède, il doit être considéré comme établi que [le requérant] a commis à tout le moins sur les personnes de [victime no 1] et [victime no 2] des actes d’abus de la détresse, (...). »

« Il en découle qu’il existait manifestement un lien de subordination et de dépendance, dont [le requérant] a profité de manière éhontée pour commettre les actes décrits par les victimes. »

« L’action pénale (...) ne pourra s’exercer en raison de la prescription même si les faits conduisent au constat qu’une infraction a bel et bien été commise sur les victimes. »

9. L’ordonnance fut reprise dans la presse où on put lire que le requérant avait commis et avoué avoir commis les actes pour lesquels il avait été poursuivi.

10. Le requérant recouru à la Chambre d’accusation genevoise, concluant au prononcé d’un non-lieu et, subsidiairement, au renvoi de la cause au procureur général pour qu’il rédige une nouvelle décision de classement se limitant à constater que les faits dénoncés étaient prescrits.

11. Par ordonnance du 5 novembre 2008, la chambre d’accusation déclara le recours irrecevable. En bref, elle considéra que, n’ayant pas été inculpé, le requérant n’était pas habilité à requérir un non-lieu et qu’elle n’avait au surplus pas la compétence de donner au procureur général des instructions quant à la rédaction et à la motivation d’une ordonnance de classement.

12. Le requérant forma un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral demandant l’annulation de l’ordonnance attaquée en tant qu’elle refusait de donner suite à sa conclusion tendant à la rédaction d’une nouvelle décision de classement.

13. Par un arrêt du 19 mars 2009, le Tribunal fédéral rejeta le recours du requérant. La cour suprême conclut qu’il n’était en tous cas pas arbitraire d’écarter un recours qui tend simplement à obtenir une motivation différente de la décision attaquée, sans que cela n’emporte de modification du dispositif de cette dernière. Quant à la violation de la présomption d’innocence alléguée par le requérant, le Tribunal fédéral observa :

« La procédure ouverte contre le recourant a été classée à raison de la prescription. Or, le constat de cette dernière impliquait l’existence d’une prévention suffisante de la commission d’actes punissables, dont il y avait lieu de rechercher de quelles infractions ils pouvaient être constitutifs, afin de déterminer quelles étaient les peines encourues, la durée de celles-ci devant être connue pour juger de l’intervention de la prescription. En tant qu’elle relève à son tour que la prévention d’abus de détresse est suffisante, mais qu’un classement devait néanmoins être prononcé en raison de leur ancienneté, la décision attaquée ne viole donc pas la garantie invoquée. »

14. Selon le Tribunal fédéral, la décision attaquée ne contenait rien qui aille au-delà de ce qui est nécessaire pour justifier le motif du classement.

15. De janvier 2008 à décembre 2012, le requérant fit l’objet d’une procédure canonique. Les termes de l’ordonnance du 25 septembre 2008 furent cités dans plusieurs actes de cette procédure dont l’acte d’accusation. Le 4 février 2011, une peine de démission de l’état clérical fut prononcée à l’encontre du requérant. Cette condamnation fut annulée le 13 décembre 2012 par un décret de la congrégation à laquelle appartenait le requérant et, par une décision du 13 mars 2013, le tribunal des prud’hommes condamna l’Église catholique romaine de Genève à verser au requérant une indemnité pour tort moral de 1 franc suisse (CHF).

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

16. L’article 116 al. 1 du Code de procédure pénale de l’État de Genève du 29 septembre 1977 (CPP/GE), qui n’est plus en vigueur depuis l’entrée en vigueur du Code de procédure pénale suisse le 1er janvier 2011, mais fut appliqué en l’espèce dispose que :

« Lorsqu’il existe un obstacle à l’exercice de l’action publique, que les faits ne sont pas constitutifs d’une infraction ou que les circonstances ne justifient pas l’exercice de l’action publique, le procureur général classe l’affaire, sous réserve de faits nouveaux ou de circonstances nouvelles. »

17. Le classement fondé sur cette disposition intervient avant l’ouverture d’une instruction pénale, laquelle ressortit au juge d’instruction. Il peut faire l’objet d’un recours à la chambre d’accusation.

18. L’article 198 al. 2 CPP/GE prévoit que :

« En cas de recours, la chambre peut renvoyer la procédure au juge d’instruction, maintenir le classement ou ordonner au procureur général de prendre des réquisitions motivées. »

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 2 DE LA CONVENTION

19. Le requérant allègue que les termes de l’ordonnance de classement du procureur général puis les décisions des tribunaux y afférentes ont méconnu le principe de la présomption d’innocence. Il invoque l’article 6 § 2 dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

« Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. »

A. Sur la recevabilité

20. Le gouvernement allègue que le requérant ne peut plus être considéré comme « victime » en raison du prononcé de la prescription de l’action pénale. Le gouvernement affirme par ailleurs qu’en avouant avoir commis les faits qui lui étaient reprochés, le requérant aurait renoncé à la protection de sa réputation.

21. Le requérant s’oppose à ces thèses.

22. La Cour note que le Gouvernement ne saurait valablement arguer de ce que le classement des poursuites retirerait la qualité de victime du requérant alors même que c’est précisément l’ordonnance de classement qui se trouve à l’origine de la violation alléguée.

23. Quant aux éventuelles conséquences d’un aveu, la Cour note que celui-ci a été prononcé en l’absence d’un avocat, que le requérant est revenu sur ces propos deux jours après son audition (voir, entre autres, Imbrioscia c. Suisse, 24 novembre 1993, série A no 275 ; John Murray c. Royaume-Uni, 8 février 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996-I ; Brennan c. Royaume-Uni, no 39846/98, § 45, CEDH 2001-X ; Salduz c. Turquie [GC], no 36391/02, § 55, CEDH 2008) et que seule la juridiction compétente était fondée à en déduire la culpabilité du requérant. En ces circonstances, on ne saurait conclure à une quelconque conséquence sur le statut de victime du requérant.

24. Partant, il convient de rejeter l’exception tirée par le Gouvernement de l’absence alléguée de qualité de victime.

25. La Cour constate que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention. La Cour relève par ailleurs qu’elle ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de la déclarer recevable.

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

(a) Le requérant

26. Le requérant allègue que l’ordonnance du procureur constitue une condamnation en ce qu’elle analyse toutes les conditions de l’infraction d’abus de détresse et conclut que cette infraction était réalisée dans les cas d’espèce. Le procureur général présente les faits comme établis sans qu’un procès contradictoire ait pu être débuté en raison de la prescription de l’action pénale. L’ordonnance du 25 septembre 2008 ne se bornerait donc pas à décrire un état de suspicion.

27. Le requérant soutient de plus qu’en refusant de modifier ou de solliciter la modification de la motivation de l’ordonnance de classement, la chambre d’accusation a également méconnu son droit au respect de la présomption d’innocence. Enfin, le Tribunal fédéral aurait fait siennes les décisions prises par le procureur général et la chambre d’accusation et aurait ainsi contrevenu aux exigences du respect de la présomption d’innocence.

(b) Le Gouvernement

28. Le Gouvernement avance que la motivation de l’ordonnance du 25 septembre 2008 ne contrevient pas aux exigences de l’article 6 § 2. Il affirme qu’en vertu de l’article 116 al. 1 du Code de procédure pénale en vigueur à l’époque des faits, la prescription était de nature procédurale et n’aboutissait pas à un acquittement. En outre, il maintient qu’une prévention suffisante de la commission d’acte punissable est une condition indispensable pour classer une procédure pénale en raison de la prescription. Le procureur général a estimé les faits établis en raison des déclarations des deux prétendues victimes et du requérant et se serait ensuite borné à les qualifier juridiquement sans se prononcer sur la culpabilité du requérant. Cette démarche serait indispensable pour déterminer les peines encourues ; la durée de celles-ci devant être connue pour juger de l’intervention de la prescription. L’ordonnance de classement ne ferait que décrire un état de suspicion.

29. Il soutient en outre que ni l’ordonnance de la chambre d’accusation, ni l’arrêt du Tribunal fédéral ne s’exprimaient sur la culpabilité du requérant.

2. Appréciation de la Cour

30. La Cour rappelle que la présomption d’innocence consacrée par le paragraphe 2 de l’article 6 figure parmi les éléments du procès pénal équitable exigé par le paragraphe 1 (voir Deweer c. Belgique, 27 février 1980, § 56, série A no 35, et Minelli c. Suisse, 25 mars 1983, § 27, série A no 62).

31. Elle se trouve méconnue si une déclaration officielle concernant un prévenu reflète le sentiment qu’il est coupable, alors que sa culpabilité n’a pas été préalablement légalement établie (voir en particulier Allenet de Ribemont, 10 février 1995, §§ 35-36 ; Daktaras c. Lituanie, no 42095/98, §§ 41-42, CEDH 2000 X ; Moullet c. France (déc.), no 27521/04, 13 septembre 2007). Il suffit, même en l’absence de constat formel, d’une motivation donnant à penser que le magistrat considère l’intéressé comme coupable (voir Daktaras c. Lituanie, précité, § 41). Par ailleurs, une atteinte à la présomption d’innocence peut émaner non seulement d’un juge ou d’un tribunal mais aussi d’autres autorités publiques, y compris de procureurs (voir Allenet de Ribemont c. France (interprétation), 7 août 1996, § 36, Recueil des arrêts et décisions 1996-III, et Daktaras c. Lituanie, précité, § 42). Ce qui est également en jeu une fois la procédure pénale achevée, c’est la réputation de l’intéressé et la manière dont celui-ci est perçu par le public (voir Allen c. Royaume-Uni [GC], no 25424/09, § 94, CEDH 2013).

32. En outre, la Cour rappelle qu’une distinction doit être faite entre les décisions qui reflètent le sentiment que la personne concernée est coupable et celles qui se bornent à décrire un état de suspicion. Les premières violent la présomption d’innocence, tandis que les deuxièmes ont été à plusieurs reprises considérées comme conformes à l’esprit de l’article 6 de la Convention (voir Marziano c. Italie, no 45313/99, § 31, 28 novembre 2002). Il y a en effet une différence fondamentale entre le fait de dire que quelqu’un est simplement soupçonné d’avoir commis une infraction pénale et une déclaration judiciaire sans équivoque avançant, en l’absence de condamnation définitive, que l’intéressé a commis l’infraction en question (voir Matijašević c. Serbie, no 23037/04, § 48, CEDH 2006-X).

33. Par conséquent, la Cour doit déterminer si, en l’espèce, l’issue de la procédure pénale met en doute l’innocence du requérant alors même qu’il n’a pas été déclaré coupable (voir Virabyan c. Arménie, no 40094/05, § 187, 2 octobre 2012).

 

34. En l’espèce, les poursuites contre le requérant ont été classées par le procureur général en raison de la prescription de l’action pénale. Il est vrai, comme le souligne le Gouvernement, que la qualification des faits allégués était nécessaire afin de déterminer quelles étaient les peines encourues et donc l’intervention de la prescription. La Cour note toutefois que l’application de l’article 116 al. 1 CPP/GE ne présuppose ni n’exige la certitude que l’infraction a été commise (voir, a contrario, Virabyan c. Arménie, précité, § 191).

35. Pour autant, l’examen des termes en lesquels l’ordonnance du 25 septembre 2008 a été rédigée ne laisse aucun doute sur l’opinion du procureur général quant à la culpabilité du requérant. En particulier, après avoir estimé que les faits été établis et examiné les conditions de constitution de l’infraction, le procureur général conclut que « l’action pénale (...) ne pourra s’exercer en raison de la prescription même si les faits conduisent au constat qu’une infraction a bel et bien été commise sur les victimes ». En outre, l’emploi d’expressions superfétatoires vient ajouter à ces constatations. Ainsi en va-t-il de la « manière éhontée » dont le requérant aurait commis l’infraction « à tout le moins » sur les deux prétendues victimes. Par conséquent, il ne fait aucun doute que l’ordonnance du 25 septembre 2008 exprime le sentiment du procureur général sur la culpabilité du requérant et ne se borne pas à décrire un état de suspicion. Or, si la qualification des faits allégués était nécessaire, rien dans les dispositions applicables n’obligeait le procureur général à en établir la réalité. Il ne tenait qu’au procureur général de choisir des termes se bornant à décrire un état de suspicion quant à culpabilité du requérant.

36. La chambre d’accusation et le Tribunal fédéral ont tous deux rejeté les recours du requérant sans désapprouver le contenu de l’ordonnance. Bien qu’aillant analysé la teneur des propos du procureur général, le Tribunal fédéral a considéré que l’ordonnance ne contenait « rien qui aille au-delà de ce qui est nécessaire à justifier le motif du classement ».

37. En outre, le contenu de l’ordonnance du 25 septembre 2008 a été repris dans la presse et a eu un poids important dans la procédure canonique. S’il peut être considéré que le public a un intérêt à être informé, un tel intérêt ne nécessitait pas pour autant d’émettre une quelconque opinion quant à la culpabilité du requérant. Or, il ne fait pas de doute que la réputation du requérant a été lourdement affectée par le fait que l’ordonnance de classement a été rendue publique (voir l’arrêt Allen c. Royaume-Uni [GC], précité, § 94).

38. Ces éléments suffisent à la Cour pour conclure que la motivation de l’ordonnance de classement du 25 septembre 2008, confirmée en substance par la chambre d’accusation et le Tribunal fédéral, a méconnu le principe de la présomption d’innocence.

39. Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 2 de la Convention.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

 

40. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

41. Le requérant réclame 141 349,60 francs suisses (CHF), soit environ 115 898,33 euros (EUR) au titre du préjudice matériel qu’il aurait subi. Cette somme représenterait les salaires qu’il aurait dû toucher entre octobre 2008, après que le procureur général a pris l’ordonnance de classement, et juin 2013, lorsqu’il put à nouveau envisager une réinsertion professionnelle.

42. Il réclame également 20 000 CHF (soit environ 16 393,44 EUR) au titre du dommage moral subi du fait que le contenu de l’ordonnance du 25 septembre 2008 serait responsable d’une dégradation de son état de santé en ce qu’elle aurait causé un état d’épuisement physique et psychique chronique.

43. Le Gouvernement soutient qu’il n’y a pas de lien de causalité entre la violation alléguée et le préjudice matériel et moral invoqué et invite la Cour à rejeter la demande faite à ce titre par le requérant.

44. La Cour relève que le licenciement du requérant était antérieur à l’ordonnance du 25 septembre 2008 et que la procédure canonique dérive d’une décision de la congrégation dont relevait le requérant donc, d’une décision canonique indépendante. Par conséquent, et nonobstant le fait qu’il y a eu des références à l’ordonnance dans certains actes relevant de la procédure canonique, la Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. En revanche, elle considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 12 000 EUR au titre du préjudice moral.

B. Frais et dépens

45. Le requérant demande également 49 000 CHF (soit environ 40 204,72 EUR) pour les frais et dépens engagés devant les juridictions internes et devant la Cour. Il soutient que son avocat a consacré à son affaire 95 heures. Le taux horaire habituel d’un avocat genevois s’élèverait à 500 CHF. À cela s’ajouterait des frais divers s’élevant à 1 500 CHF.

46. Le Gouvernement estime que la somme de 9 060 CHF couvrirait l’ensemble des frais et dépens pour la procédure engagée sur le plan national et devant la Cour.

47. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. Elle considère comme exagérée la demande du requérant. En l’espèce, et compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable la somme de 15 000 EUR au titre des frais et dépens et l’accorde au requérant.

C. Intérêts moratoires

48. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 2 de la Convention ;

3. Dit

a) que l’État défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes, à convertir en francs suisses au taux applicable à la date du règlement) :

i) 12 000 EUR (douze mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral ;

ii) 15 000 EUR (quinze mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par le requérant, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

4. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 28 octobre 2014, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

 

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